Tout plutôt qu’un vrai boulot — Tex Cobb (42-7-1)

Culture Boxe

emanuel-augustus

Le 29 janvier 2011, dans le Michigan, tu as livré, à trente-six ans, ton soixante dix-huitième et dernier combat. Comme d’habitude, tu as été prévenu au dernier moment. Comme souvent, tu as perdu en dansant. La routine.

La boxe se divise en deux catégories. Ceux qui gagnent, grâce au soutien de leur promoteur, l’habileté de leur coach, puis avec un peu de talent aussi. Ceux qui perdent, chair à canon, juste bonne à faire gonfler le palmarès de leurs bourreaux. Des tomato cans. Et toi, entre deux eaux, le dernier des journeymen, un type qui accepte tous les combats, n’importe où, n’importe quand, contre n’importe qui. Une perle rare qu’on peut appeler au dernier moment pour boxer plus fort, plus grand, mieux préparé, jusqu’à trois fois par mois. Un boxeur aux identités multiples, parfois artiste, inventif, roi de l’esquive, parfois dur au mal, encaisseur à l’ancienne, capable d’aller au bout de lui-même pour retourner une situation compromise ou simplement pour tenir la distance, par orgueil.

Décisions frauduleuses, vols caractérisés, combats mal préparés… Tout est oublié, Emanuel. Tout sauf la « string-puppet dance » (*la danse du pantin). Dans les salles de Chicago, les anciens radotent au bord du ring : « Souv’nez-vous du p’tit Manny. Ç’ui qui dansait sous les coups des champions ». On t’appelait « The drunken master » (*Le maître ivre). Mais ta seule ivresse c’était celle du ring. Et aucun juge corrompu n’est jamais parvenu à effacer ton sourire.

Sans doute parce que là-haut, entre les cordes, c’était toi qui menais la danse.

NZ

Emanuel Augustus, la dernière danse