Tout plutôt qu’un vrai boulot — Tex Cobb (42-7-1)

Culture Boxe

Alvarez-Golovkin

La vie de boxing writer n’a rien d’un long fleuve tranquille.  On ne roule pas sur l’or, nous. Le blog ? Des clopinettes. A croire qu’il n’existe que pour la beauté du geste.

Et le magot amassé sur le ring ? 50 pesos mexicain en tout et pour tout, immédiatement roulés en tacos et goulûment absorbés par votre serviteur.

La boxe est cruelle. Parfois franchement désagréable. Rien qu’il y a trois semaines, elle a battu tous les records de vulgarité.

Mais cette nuit, elle semble bien décidée à choyer ses vieux fans grognons. Cette nuit, il est heureux, le fan de boxe. Les cheveux en bataille, vêtu d’un élégant pyjama, il jubile en croisant les doigts pour que le streaming tienne le choc.

Il avale une première fournée de petits gâteaux en se pinçant. Non, il ne rêve pas : Canelo Alvarez et Gennady Golovkin sont sur le point de monter sur le ring de la T-Mobile Arena de Las Vegas. Un vrai combat de boxe, bordel de nouille ! Entre un boxeur en pleine ascension, Canelo (49 victoires dont 34 par KO, 1 nul, 1 défaite contre Floyd Mayweather). Et l’explosif GGG (37 victoires dont 34 par KO).

Clairement, cela fait des années que ce combat est dans toutes les bouches. Golden Boy Promotions ne s’est pas pressé, laissant le temps à Canelo de prendre suffisamment de muscle (et d’expérience) pour faire le poids en moyen. Et à Golovkin, 35 printemps tout de même, d’entamer un inévitable déclin ?

Le menton du Mexicain sera-t-il suffisamment solide pour soutenir la puissance du Kazakh ? Golovkin est-il devenu un vieux croûton ? Les juges résisteront-ils à la tentation de favoriser les intérêts du boxeur estampillé Golden Boy Promotions ? Autant de questions qui appellent une réponse imminente.

Dans le couloir qui le mène au ring, GGG s’est départi de son éternelle banane. T-shirt blanc, peignoir bleu-or, le roi des moyens affiche une mine grave au moment d’entrer en scène. Canelo, lui, a choisi un poncho aux couleurs du Mexique, fête nationale oblige. A 27 ans, son heure de vérité est arrivée. Celle des deux hommes, en réalité. C’est en remportant ce genre de combat qu’on passe du statut de champion à celui de légende. Canelo rejoint Golovkin sur le carré de lumière au son d’un corrido typiquement mexicain. Et Michael Buffer, sorti de sa boîte à formol pour l’occasion, peut dégainer son légendaire Let’s Get Ready To Rumble.

Les premiers rounds sont surprenants. Canelo brille de mille feux. Il bouge bien, contre avec plein d’à propos. Golovkin semble un peu émoussé. Le triomphe de la jeunesse ?  Encore un peu tôt pour le dire. Golovkin touche malgré tout avec des jabs particulièrement lourds. Le punch a toujours été la dernière cartouche des trentenaires.

Peu à peu, le champion en titre trouve le rythme. Au 5e, Canelo fait connaissance avec la droite de GGG. Malgré ses dénégations et l’excellente qualité de ses esquives, les cordes ne sont pas un endroit où il fait bon vivre. Surtout avec Golovkin en face. Canelo plie mais ne rompt pas. Ce soir, le Mexicain prouve qu’il est doté d’un menton d’une solidité tout à fait honorable, pour ne pas dire plus.

Quoi qu’il en soit, à la mi-combat, le Kazakh a pris ses aises. Cette façon de vous marcher dessus, sans vous laisser un moment de répit, c’est épuisant, même à regarder. C’est la méthode Golovkin et Alvarez a tout le mérite du monde de ne pas se décomposer sous la pression. Parfois, même, il réplique et le bruit de ses coups claque dans la nuit de Las Vegas. Mais son rival a, lui aussi, un menton en acier trempé.

Au bout des 12 rounds, les juges ont le destin du combat entre leurs mains potelées. Les deux hommes ont été d’une épatante justesse technique, mais Golovkin a marché sur Alvarez. C’est lui qui a fait le combat. Impossible de lui retirer ses ceintures après un tel effort. A cet égard, carton rouge pour l’officiel ayant scoré 118-110 en faveur d’Alvarez. Les deux autres ont, Dieu merci, davantage de sens commun ou moins d’alcool dans le sang : 115-113 pour GGG et 114-114.

C’est donc un match nul qui appelle un second match. Et une victoire pour la boxe.

C’est surtout l’heure de se recoucher, avec la banane.

NZ

Le bonheur était au rendez-vous : ça valait le coup de mettre son réveil pour Canelo vs. Golovkin !