Tout plutôt qu’un vrai boulot — Tex Cobb (42-7-1)

Culture Boxe

Samedi dernier, Manny Pacquiao a conservé sa ceinture WBO des poids welters en battant Shane Mosley dans un combat à sens unique.

Une victoire en demi-teinte obtenue devant un adversaire vieillissant qui a fui l’affrontement pendant 12 rounds. Une victoire qui conforte malgré tout la place de Manny Pacquiao au panthéon du noble art : une série en cours de 15 victoires depuis sa dernière défaite, en 2005 contre Erik Morales, des titres de champion du monde dans 8 catégories de poids différentes et d’impressionnantes batailles remportées contre les plus grands : Oscar De La Hoya, Erik Morales, Juan Manuel Marquez, Marco Antonio Barrera, Ricky Hatton, Miguel Cotto,…

Pour marquer le coup, CultureBoxe a interrogé des compatriotes du champion : Karen Grace Marquez et Don Nod del Rosario, deux communicants philippins rencontrés à Phnom Penh.

Don Nod Del Rosario a le même âge que Manny et a grandi dans le même coin.

Don, tu viens du même quartier que Manny Pacquiao ?

Oui, de la même communauté. Mon cousin est un de ses amis et on connaît tous sa famille. Ils étaient très modestes et vivaient dans une petite maison en bois. Son père vendait du poisson sur les marchés et lui faisait des petits boulots mal payés.

Il boxait déjà ?

Oui, mais dans des conditions vraiment rudimentaires. A chaque fois qu’il y avait une fête, on plantait quatre piquets et quelques jeunes dont Manny Pacquiao combattaient.  Il était si maigrichon, il battait souvent des types plus grands et plus forts que lui.

Tu t’attendais à ce qu’il ait autant de succès ?

Pas vraiment car rien n’a été facile pour lui. Il ne gagnait pas tous ses combats et même quand il est parti à Manille pour en disputer de plus gros, il a continué à lutter pour réussir. C’est aussi pour ça qu’aujourd’hui on est si fiers de lui, du boxeur autant que de l’homme.

Parle-nous de l’homme

C’est quelqu’un de très croyant : il va systématiquement à la messe avant ses combats et monte sur le ring un rosaire autour du cou. Il n’oublie pas d’où il vient. Il aide les gens.

Par exemple ?

A chaque fois qu’il est de retour après un combat, des centaines de personnes font la queue devant chez lui et il leur distribue de l’argent : 20 ou 30 $ à chacun, parfois 100 $. En ce moment il est en train de faire construire un hôpital. Je connais quelqu’un qui n’avait pas d’argent pour emmener son fils à l’hôpital et qui est allé voir Manny Pacquiao pour lui demander de l’aide. Manny lui a dit d’aller à l’hôpital, qu’il payait tout.

L’argent et le succès ne l’ont pas changé ?

Non, il a toujours eu les pieds sur terre. Bon c’est vrai qu’il aime bien être entouré de jolies filles… Mais bon, comment lui en vouloir ? Toutes les filles se jettent sur lui : il est beau, il est riche et sympa !

Et la politique ?

Ca ne me plaît pas trop. Il peut aider – il le fait déjà – sans avoir besoin de faire de la politique. Ce n’est pas au Congrès qu’il est le plus utile. D’ailleurs il y passe peu de temps. Il a d’autres activités importantes comme la boxe. Même s’il a sans doute une équipe qui travaille pour lui au Congrès, il est plus un symbole qu’autre chose.

Comment tu vois son futur ?

Niveau boxe, on est nombreux à souhaiter qu’il arrête au sommet de son art. Il a déjà battu tous les records, à quoi bon continuer ? On ne veux pas qu’il fasse le combat de trop.

Niveau politique, une fois retiré des rings je suis sûr qu’il tentera d’accéder à de plus hautes responsabilités. J’espère qu’il ne se présentera pas à l’élection présidentielle. En tout cas, je ne voterai pas pour lui. Cela dit je le respecte et l’admire notamment pour tout ce qu’il représente pour nous. Quand il est sur le ring nous nous sentons tellement fiers. Chaque victoire est fêtée comme une victoire du peuple philippin. Maintenant tout le monde nous situe sur la carte du monde.

Karen Grace Marquez

Karen, comment tu expliques la place qu’occupe Manny Pacquiao dans les cœurs phiippins ?

C’est simple, il gagne tous ses combats. Les Philippins sont vraiment fiers de lui. C’est un héros national.

Que se passerait-il en cas de défaite ?

Peu importe, il resterait notre héros. Maintenant, c’est vrai qu’on préfèrerait qu’il arrête pendant qu’il gagne encore.

Que penses-tu de son engagement politique ?

Ca ne me plaît pas trop qu’il soit entré en politique tout en continuant sa carrière de boxeur. Il ne peut pas bien faire les deux choses à la fois.  C’est un excellent boxeur, je ne comprends pas qu’il ait voulu siéger au Congrès, d’autant qu’il n’a aucune formation pour faire de la politique. Il n’a pas besoin de faire de la politique pour aider les gens.

A-t-il un futur politique ?

J’espère qu’il ne se présentera pas à la présidentielle mais son entourage – la Team Pacquiao – va sans doute l’y pousser. Il a de l’argent, les gens l’adorent, il pourrait être tenté d’occuper de plus hautes fonctions politiques. C’est un excellent boxeur, il a un cœur gros comme ça mais s’il devient président, ce sera un pantin aux mains des politiciens qui l’entourent

nicolas@zeisler.fr

Manny Pacquiao vu par ses compatriotes