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Culture Boxe

Salvador Sanchez, rêves brisés

Par    le 10 avril 2017

sanchez

Il y a dix ans, j’ai posé mes valises au Mexique. Maladroitement, j’essayais de gagner mes galons de boxeur amateur. Tous les jours à la salle, sparring deux fois par semaine. Le dimanche, on grimpait dans la vieille DS du coach pour une course en côte, histoire de respirer l’air pur des collines qui entourent la grande ville.

Après m’avoir plié en deux, les boxeurs du coin m’avaient ouvert leurs bras. À croire que j’avais payé mon dû. Quand on rompait le jeûne, ils m’emmenaient dans les quartiers louches de la ville. Les hamburgers de Tacubaya, je connais. Les tacos de Tepito, aussi.

Parfois, on se livrait. Chester, notamment, bon boxeur, finaliste des Golden Gloves quand je m’étais piteusement fait sortir au premier tour. Il m’avait confié son rêve : devenir champion du monde. Comme Salvador Sanchez, son idole dont il mimait la boxe audacieuse sur le ring. Le rêve de mon ami s’est fait démolir à coups de poings. Il a raccroché les gants, chié deux mômes et aujourd’hui, il entraîne de jeunes boxeurs.

Salvador, Chester avait raison. Ça aurait été dommage de se louper tous les deux.

Une touffe improbable sur la tête. Une boxe hystérique. Une météorite, t’étais. À vingt et un ans, relativement inconnu, tu avais fait une entrée fracassante dans le gotha des poids plumes en démolissant le frappeur Danny Lopez, le 2 février 1980 à Phoenix. L’année suivante, Wilfredo Gomez aurait dû te renvoyer à tes chères études. Celles de médecine, que tu avais prévu de commencer après avoir raccroché.

Wilfredo était un redoutable puncheur. Un vieux routier à la langue bien pendue. Il racontait à qui voulait l’entendre que tu ne verrais pas la couleur de la neuvième reprise. Tu n’as pas pipé mot. Le jour du match, il a payé par là où il a péché. Martyrisé jusqu’à la huitième.

Quand tu as crashé ta Porsche, le 12 août 1982, entre Queretaro et San Luis de Potosi, le Mexique a perdu son fils chéri. Tu avais vingt-trois ans. Julio Cesar Chavez en avait dix-neuf. Il avait surtout le champ libre.

NZ

Salvador Sanchez, rêves brisés