
vroom originals m’a posé cette question il y a un peu plus d’un an. Ayant pratiqué ce sport, avec insuccès sur le ring – un combat, une défaite, excusez du peu -, puis avec un peu plus de succès (d’estime) devant un tas de feuilles blanches ou un écran noir, envoyé un nombre incalculable de postillons dans le micro de « CultureBoxe, direct dans tes oreilles » pour raconter les aventures de Joe, George, Marcel, Johnny et compagnie… J’ai considéré que je n’étais pas moins armé qu’un autre pour tenter d’y répondre.
Ce qui se passe sur le ring relève certes de l’indicible, mais j’ai une tendresse particulière pour les combats perdus d’avance. Plutôt que de jeter l’éponge en marmonnant un « No más » de circonstance, j’ai tenté de cadrer cet insaisissable.
La boxe est un objet culturel à part entière. Un combat est un récit organisé en douze actes, avec deux personnages, pas ou peu de dialogues. C’est l’histoire la plus imprévisible qui puisse s’écrire. C’est une source d’inspiration pour les plumitifs et un moyen d’expression pour les boxeurs. Le ring est le catalyseur et le théâtre des vies intérieures mouvementées des hommes et des femmes qui s’y produisent.
George Foreman a dû chuter pour connaître Dieu et devenir lui-même. Il a ensuite englouti des milliers de burgers et dépensé des millions de dollars pour prêcher la parole divine. Il est remonté sur le ring pour se refaire et faire taire ses démons. Au bout de ce long chemin de croix, il ne lui a fallu qu’une droite – la dernière – pour mettre KO Michael Moorer, la graisse, l’âge et surtout pour boucler la boucle, vingt ans après le cauchemar zaïrois.
Derrière le crochet du gauche de Joe Frazier, il y a les silences et la rage d’un homme qui a subi l’OPA agressive d’Ali sur la couleur noire et essuyé une pluie d’insultes. Contrairement à Big George, il n’a jamais digéré ni pardonné. Jusqu’à la fin, il se sera battu contre Ali et pas avec. Il était comme ça, Joe. Un gars terre à terre, qui n’avait qu’une parole et qui s’arrêtait pour donner un coup de main dès qu’il voyait une voiture en panne sur le bord de la route.
Pourquoi LaMotta refuse-t-il de tomber devant Sugar Ray Robinson le soir de leur sixième combat ? Jake a toujours dit qu’il se fichait de mourir sur le ring. Pendant des années, il a cru à tort avoir tué un homme lors d’un braquage. Il se serait lancé dans la boxe car il se sentait coupable et voulait être puni. Hasard ou coïncidence, quand il finira par apprendre que sa victime a survécu, sa carrière entamera une chute brutale. De là en déduire qu’il boxait autant pour faire mal que pour se faire du mal…
—
La Boxe, c’est quoi ? est publié aux éditions vroom originals
Texte : Nicolas Zeisler
Illustrations : Ferry Gouv
Préface : Bruno Surace
Édition : Hossein Adibi
Supervision éditoriale : Jérémy Denis
Pour commander le livre : c’est par ici