Pour un gars de Quilmes, c’est plutôt chic d’avoir toujours refusé de te faire mettre en bouteille, Sergio.
À huit ans, tu as enfourché ton premier tricycle, promesse d’une personnalité tout-terrain. Mais l’appel du potrero (*terrain vague)a été le plus fort. Diagonale au cœur, tu ne pouvais pas mieux dire : « tout Argentin rêve d’être Maradona ».
Toi, tu seras plutôt Monzon ou Locche. Sur le tard, certes, vingt ans et des poussières, mais tu as bien rattrapé le temps perdu. Trois mois seulement pour t’offrir tes premiers rounds d’amateur. Et tout s’enchaîne à merveille. Tu cognes dur, tu bouges vite. On te fuit comme la peste.
En 2001, ton grand pays connaît la crise et tu sautes le pas ou plutôt l’Atlantique. Direction l’Espagne, sans un sou en poche mais des rêves de gloire plein la tête. En attendant ton heure, tu fais la plonge et tu sues dans les gymnases madrilènes. Elle viendra deux ans plus tard. L’adversaire de Richard Williams, prospect de la couronne, fait faux bond. Les promoteurs anglais sont à la recherche d’un candidat pas trop mal classé. Prévenu huit jours avant le match, tu feras bien l’affaire.
Premier round, le public de Manchester n’a pas fini sa première pinte que Richard Williams t’a envoyé au tapis. Les Anglais ont beau trinquer, tu te relèves et tu déroules pour l’emporter aux points. Champion d’Europe.
En 2003, c’est un autre Williams, Paul, à la recherche d’un remplaçant de dernière minute qui t’invite à le rejoindre sur le ring d’Atlantic City. Choc explosif et deux hommes à terre dès la première reprise. Paul Williams l’emporte aux points. Pas question de rembarquer pour autant : Kelly Pavlik, puis Paul Williams pour la revanche et Julio Cesar Chavez Jr, seront balayés dans les mois qui suivent. Champion du monde.
Pas de cordeau pour amarrer le temps. Nuque, coudes, genoux en compote, chevilles fragiles, tu es un funambule qui boxe au-dessus du précipice. Le 7 juin 2014, au Madison Square Garden de New York, Miguel Cotto et son crochet du gauche ont sonné la fin de la récré.
Il est temps Maravilla (*Merveille, le surnom du boxeur) de dire adieu à l’enfance.
NZ